La période d’essai marque le début d’une aventure commune entre l’entreprise et le nouveau collaborateur. On peut penser que c’est l’employeur qui a le dernier mot, mais cette étape permet de rompre librement le contrat de travail réciproquement. Ainsi, selon une étude Mozart Consulting (2017), 18,2 % des recrutements en CDI sont annulés à l’issue de la période d’essai. Dans 2 cas sur 3, c’est le salarié qui rompt le contrat de travail. Cette période est source d’incertitude et potentiellement de stress. Mais alors, comment bien manager durant cette phase de découverte mutuelle ?
Nous vous livrons nos conseils dans cet article.
La période d’essai, un contexte incertain
Une fois le processus de recrutement terminé, la période d’essai constitue pour l’entreprise le moment de découverte des compétences, des savoir-être et de la motivation du nouveau collaborateur dans son environnement de travail. De son côté, le salarié va expérimenter le fonctionnement de la structure en interne, faire connaissance avec ses collègues et mettre en pratique ses missions. C’est ainsi qu’il va s’assurer que son poste lui plaît.
Cette phase d’observation permet aux deux parties de répondre aux questions suivantes : la nouvelle recrue correspond-elle réellement au poste ? Et inversement, l’entreprise convient-elle au nouveau collaborateur ?
Cette période avant l’embauche définitive est source d’incertitude et donc de stress :
- pour la nouvelle recrue qui ne sait pas réellement où elle met les pieds.
- pour le recruteur et le manager, qui mettent en jeu la crédibilité de leurs choix si la nouvelle recrue s’avérait décevante.
- pour l’équipe en place, qui doit accueillir un nouveau membre et qui peut voir son équilibre déstabilisé.
Face à cette problématique, il est nécessaire d’instaurer un climat de confiance réciproque. L’enjeu de la période d’essai est de créer un cadre limitant le stress lié à l’incertitude pour toutes les parties prenantes. Le recruteur et le manager doivent donner aux collaborateurs toutes les clés pour réussir cette étape.
Comment réduire l’incertitude ?
Pour la nouvelle recrue
Les premiers jours sont souvent décisifs lors de l’intégration du salarié, il est donc important de transmettre la culture d’entreprise, d’instaurer une bonne communication et de développer l’auto-évaluation dès le début du contrat.
S’approprier la culture d’entreprise
L’arrivée d’une nouvelle recrue dans l’équipe implique de présenter la culture de votre société pour qu’elle puisse plus facilement l’appréhender. Prévoyez une présentation des valeurs, de la vision et de la mission pendant la première semaine du collaborateur pour lui permettre d’intérioriser les normes de l’entreprise et de renforcer sa motivation.
Dès les débuts en entreprise, il faut favoriser la collaboration en interne dans les équipes de travail. Selon les sociologues Louis, Posner et Powell, les échanges au même niveau hiérarchique semblent réduire l’incertitude, renforcer l’attachement à l’organisation et limiter les départs volontaires. Au-delà du parcours d’intégration, ce sont les interactions informelles entre collaborateurs, mais également avec la direction qui permettent concrètement de s’acculturer à l’entreprise.
Selon la chercheuse américaine Meryl Reis Louis, le salarié doit lors d’une transition professionnelle “confronter le choc de la réalité et s’ajuster aux différentes demandes de son nouvel emploi.”. L’appropriation de la culture organisationnelle ne doit pas pour autant effacer la personnalité du salarié. Ce dernier doit intégrer les comportements et les mécanismes de l’entreprise tout en apportant sa touche personnelle.
Communiquer régulièrement
Pour accompagner l’arrivée du salarié, il est important de prévoir des points réguliers avec le N+1 aussi bien sur les missions et le travail à réaliser que sur le ressenti au sein de la société. Selon l’étude de Jablin (1984), il existe chez les nouvelles recrues un “sentiment de privation d’informations” : ils ont tendance à croire qu’ils ne reçoivent pas suffisamment d’informations. Pensez à bien communiquer tous les éléments nécessaires à leur intégration, à partager vos attentes et donner des retours sur la performance. Ces informations sont précieuses pour réduire l’incertitude du collaborateur.
S’auto-évaluer
Il est bénéfique pour le salarié et l’entreprise de créer une dynamique d’introspection et d’encourager l’auto-évaluation. Pendant la période l’essai, l’employé pourra se tester et évaluer ses compétences et son comportement en fonction de son nouveau poste. Prendre un temps de recul sur le travail réalisé, réfléchir aux aspects positifs et aux axes d’amélioration : ces questionnements responsabilisent le salarié et l’incitent à prendre des initiatives. L’auto-évaluation du collaborateur lui permet de gagner en autonomie et l’aide à prendre la décision de rester ou non dans l’entreprise.
Pour l’équipe en place
En interne, l’arrivée d’une nouvelle recrue peut se faire dans le cadre d’un remplacement, d’une création de poste ou d’un renfort ponctuel des effectifs. Selon le cas de figure, l’équipe appréhendera différemment ce recrutement. Il est nécessaire de préparer, d’accompagner et de sonder les membres de l’entreprise.
Préparer l’arrivée du nouveau collaborateur
Pour faciliter l’arrivée du nouvel employé, préparez en amont vos équipes au changement. Annoncez en interne votre volonté de recruter et informez les personnes concernées de l’évolution du processus de recrutement. Si le poste est nouveau dans l’entreprise, expliquez les missions et les objectifs de cette embauche. Une fois le candidat sélectionné, vous pouvez le présenter à l’équipe en envoyant son CV et en parlant de son profil. Il sera alors plus facile pour l’équipe d’intégrer le nouveau membre.
Accompagner le changement
L’équipe doit être accompagnée et impliquée dans le changement qui se produit dans l’entreprise pour susciter une dynamique de groupe et favoriser le travail collectif. Pour cela, créez des mécanismes d’entraide, incitez à la collaboration des différentes équipes, favorisez les échanges informels. Le tutorat peut être une piste complémentaire à exploiter pour impliquer les salariés. Ce système de parrainage se révèle être enrichissant pour l’entreprise, le nouveau collaborateur et le tuteur. Ce dernier valorise son expérience, devient ambassadeur auprès de la nouvelle recrue et développe son réseau en interne.
Sonder les équipes
Il est également toujours intéressant de sonder les collègues au sujet de l’intégration du nouveau collaborateur : quelle est l’impression du manager par rapport aux compétences et au savoir-être de la personne ? Quel est le ressenti des collaborateurs qui travaillent avec la nouvelle recrue ? Une mauvaise impression partagée par plusieurs membres de l’équipe amènera à une réflexion sur l’embauche du salarié.
Comment se répartir les rôles ?
Le rôle du recruteur
Le recruteur est chargé du suivi administratif, de la transmission de la culture d’entreprise et du bien-être du salarié. Le recruteur définit en amont avec les équipes le processus d’onboarding.
Au cours de la période d’essai, le recruteur peut demander à l’employé de rédiger un rapport d’étonnement. Ce document permet au collaborateur de prendre du recul sur ses débuts dans l’entreprise et de partager ses remarques. Pour votre société, cela permet de récolter des critiques constructives et de parfaire le parcours d’intégration. Le recruteur peut aussi s’assurer de l’acculturation de la nouvelle recrue : le rapport peut mettre en évidence un décalage entre l’état d’esprit de l’employé et la culture de l’entreprise. Un écart trop important révélera que ce n’est pas la personne adaptée au poste !
Le rôle du manager
Le manager a pour mission d’encadrer ses équipes, de fixer des objectifs et de répartir les tâches. Lors de la période d’essai, son rôle est d’effectuer le suivi opérationnel de la nouvelle recrue. Il doit anticiper l’arrivée du collaborateur, préparer le poste et les outils de travail. Une fois que la nouvelle recrue a rejoint l’entreprise, le manager encadre le salarié, le guide vers ses missions et communique régulièrement avec lui.
Suite aux échanges avec le recruteur, l’équipe en place et la nouvelle recrue, c’est au manager d’annoncer la décision de l’entreprise pendant la période d’essai.
🤔 Aborder le sujet ou ne pas l’aborder ?
Le salarié connaît la durée de sa période d’essai qui est mentionnée dans son contrat de travail. Aborder le sujet trop fréquemment pourrait lui faire peur : cette période ne doit pas donner l’impression au nouveau collaborateur d’avoir une épée de Damoclès au-dessus de sa tête ! Préférez des échanges sur le ressenti à ses débuts dans l’entreprise plutôt qu’une réunion pour parler spécifiquement de la période d’essai. Toutefois, il est pertinent d’organiser un entretien pour annoncer la décision finale à l’approche de la date butoir.
Si tout se passe bien, informez votre collaborateur de son embauche un peu avant la fin de cette période. Il est important de communiquer cette information pour s’assurer de l’accord des deux parties. Vous souhaitez tous les deux poursuivre l’aventure ? Organisez un moment avec l’ensemble de l’équipe pour marquer cette étape (petit-déjeuner au bureau, repas au restaurant, surprise pour le collaborateur…).
Vous n’êtes peut-être pas convaincu par la nouvelle recrue ou bien vous souhaitez avoir plus de temps avant de l’embaucher ? Vous pouvez renouveler la période d’essai en fonction de la convention collective et de la durée de renouvellement indiquée dans le contrat. Donnez des signaux d’alerte pour prévenir l’employé et expliquez-lui votre décision, faites en sorte que le salarié ne soit pas déstabilisé par votre décision.
La collaboration avec le salarié recruté ne se passe pas comme prévu ? Vous serez peut-être surpris de constater que ce ressenti est partagé par la personne et ce sera alors dans votre intérêt commun d’arrêter l’aventure. La période d’essai vous permet de rompre le contrat tout en respectant le délai de prévenance. Ce délai varie en fonction du temps de présence du salarié dans l’entreprise.
🧐 Connaissez-vous les effets lune de miel et gueule de bois ?
Plusieurs sociologues ont montré que, lors d’un changement d’emploi, les nouvelles recrues ressentent une forte satisfaction à l’arrivée dans l’entreprise, c’est “l’effet lune de miel” ou honeymoon effect. Puis avec le temps et l’adaptation au nouvel environnement de travail, elles ont tendance à perdre en motivation, satisfaction et engagement. Le salarié connaît après l’euphorie des débuts une phase de désenchantement que l’on appelle “l’effet gueule de bois” ou hangover effect. (Source : Article de l’université de Reading)
Pour prévenir toute désillusion une fois la période d’essai terminée, assurez-vous qu’il n’existe pas d’incohérence entre votre marque employeur et la réalité dans l’entreprise !
En résumé
- La période d’essai est une phase d’observation entre le nouveau collaborateur et l’entreprise qui permet à chaque partie de rompre librement le contrat de travail.
- Elle est source d’incertitude et de stress pour la nouvelle recrue, mais aussi pour le recruteur, le manager et l’équipe en place.
- Elle nécessite une bonne préparation pour permettre au salarié de s’approprier la culture de la structure et d’établir une relation de confiance réciproque.
- Les échanges au même niveau hiérarchique semblent réduire l’incertitude, renforcer l’attachement à l’organisation et limiter les départs volontaires.
- Le secret d’une période d’essai réussie passe par une bonne communication avec des retours réguliers pour anticiper la fin de cette étape.
- L’expérience collaborateur doit être soignée dès le début du contrat et doit être entretenue une fois le salarié embauché.
Pour aller plus loin
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- Le processus de recrutement
- Le processus d’intégration
- Le poste occupé
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